L’histoire de la Shoah par le document. Le recueil de documents comme forme d’écriture historique

Illustrationshoah20 octobre de 14h-17h
21 octobre de 9h-17h
Journées d’étude

L’édition et la publication de « matériaux » et de « documents » tient une grande place dans la première historiographie de la Shoah, dominée par l’activité des centres de documentation et commissions historiques créées au lendemain de la guerre. Si ces institutions et les parcours des « survivor historians » commencent d’être bien connus, si les conceptions historiographiques de ces derniers font l’objet d’une relecture attentive, les opérations historiographiques concrètes, la manière de produire de la « documentation » pour faire histoire, d’articuler « documents » et commentaires, de disposer des traces dans une écriture et de les donner à voir, demeurent peu étudiées.

Il ne s’agit pas que d’une simple cuisine historiographique : les « documents » constituaient une ressource fondamentale pour ces historiens qui avaient, pour certains, un lien biographique avec la documentation qu’ils utilisaient et publiaient (parce qu’ils avaient contribué à la sauver, à la collecter, à la conserver) et on sait combien la maîtrise de la documentation put constituer un enjeu institutionnel et politique majeur dans l’après-guerre. Par ailleurs, ces « documents » ne sont pas des écrits stables : comme pour les individus, on peut reconstituer leurs itinéraires, depuis les contextes de leur production jusqu’aux époques de leurs publications, souvent plurielles. Dans ces itinéraires d’écrits, les questions d’auctorialité (qui est l’auteur du témoignage constitué en document ?), de la frontière entre « document » produit pendant la guerre et « témoignage » des lendemains, se trouvent souvent considérablement complexifiées.

On cherchera à rendre compte de cette complexité, qui a pu conduire souvent les historiens des générations suivantes à se tenir à distance de ces corpus de « recueils de documents » qui ne répondaient pas à leurs attentes historiographiques, tant ces recueils semblaient curieusement assemblés, insuffisamment référencés, trop « littéraires », marqués par des questionnements historiographiques problématiques ou erronés, surdéterminés par les luttes politiques de la guerre froide, ou par des logiques de vengeance ou de piété.

La sortie du « document » de l’agenda intellectuel des historiens de la Shoah fait également partie des questions que nous aimerions soulever. En réalité, on n’a jamais cessé de publier des documents, mais différemment, en oubliant ces premiers recueils, ou en les retravaillant sans le dire. Alors que la première époque de l’historiographie suscite un regain d’intérêt, comment publie-t-on des « recueils de documents » aujourd’hui, et selon quels liens avec les entreprises documentaires de l’immédiat après-guerre ? C’est pour répondre à cette question que la première session de ces journées sera consacrée à l’actualité la plus récente de cette manière spécifique d’écrire l’histoire en publiant des recueils de documents : le volume consacré à l’Europe de l’Ouest de cette entreprise de longue haleine Die Verfolgung und Ermordung der europäischen Juden durch das nationalsozialistische Deutschland 1933-1945 vient d’être publié. Il sera discuté en présence des auteurs.

Comité organisateur :

Judith Lyon-Caen (EHESS-CRH), Barbara Lambauer (IfZ, Munich-Berlin/SIRICE,Paris), Florent Brayard (EHESS-CRH), Judith Lindeberg (EHESS-CRH), l’équipe Histoire et Historiographie de la Shoah Avec le soutien de soutien de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah.

Programme

Version française

Version anglaise

Lieu

EHESS
Salle Jean-Pierre Vernant
190, avenue de France
75013 Paris