Mein Kampf. Une histoire française (1925-2016). Traductions, réceptions, polémiques

Appel à contributions – Date limite : 1er mars

Colloque international, organisé par le Centre de recherches historiques, équipe Histoire et historiographie de la Shoah (EHESS-CNRS), le LabEx Tepsis, l’Université Bordeaux Montaigne et l’Institut historique allemand de Paris

Jeudi 23 et vendredi 24 novembre 2017
(Institut historique allemand – Paris)

Version anglaise

Rédigé entre 1924 et 1926, le livre d’Adolf Hitler a récemment connu une exposition médiatique sans guère de précédent. Son passage dans le domaine public au 1er janvier 2016, soixante-dix ans après la mort de son auteur, a en effet suscité de nombreuses polémiques à l’échelle européenne et une interrogation de fond sur le statut de ce texte souvent élevé au rang du mythe. En Allemagne, l’Institut für Zeitgeschichte de Munich (IfZ) a mené à bien un imposant travail d’édition critique : le texte, dont toutes les variantes ont été établies, est à présent disponible en deux volumes massifs, qui comprennent plus de 3 500 notes de bas de pages. Le pari d’une réflexion historique de fonds sur le texte semble être en passe de réussir, même s’il est encore trop tôt pour se prononcer.
Il est probable que cette édition critique servira de base pour les éditions scientifiques dans d’autres pays. Un projet vient d’être lancé aux Pays-Bas. En France, l’annonce, en octobre 2015, d’une nouvelle édition de Mein Kampf a fait brièvement polémique. Aboutissant à une relative convergence sur la nécessité de publier une édition scientifique française, elle a surtout mis en lumière un fait essentiel : rien, ou presque, n’est connu de l’histoire de la trajectoire du texte en France. Depuis la publication de sa traduction intégrale en 1934 par l’éditeur Fernand Sorlot, avec l’aide de la Ligue internationale contre l’antisémitisme, jusqu’à sa réception dans les années 1930 ; de son devenir pendant la guerre au procès de Sorlot à la Libération ; du débat de 1979 autour d’un avertissement en incipit du texte à sa postérité l’utilisation du texte dans les milieux d’extrême droite ; notre connaissance des conditions de l’établissement du texte français est très floue et alimente des débats dont les fondements sont rarement solides.
Ce colloque international et interdisciplinaire se propose donc de penser la circulation du texte en France, pour essayer d’éclairer, comme l’a fait l’historien Othmar Plöckinger pour l’Allemagne, les éléments les plus importants de la généalogie du texte français, de sa réception et des débats qu’il a soulevés. La bibliographie se révélant bien peu fournie, il s’agit de défricher, pour la première fois, cette histoire qui n’a pas été écrite.
Les historiens du nazisme, de la Shoah ou de Vichy auront bien sûr leur mot à dire, mais cette réflexion ne peut se mener sans une ouverture aussi large que possible aux historiens du livre et de l’histoire politique et intellectuelle française, aux germanistes, aux traductologues, aux spécialistes de littérature, aux sociologues et aux anthropologues, c’est-à-dire à tous ceux qui, dans leur recherche, ont rencontré Mein Kampf et sont susceptibles de contribuer à notre savoir sur son histoire française.

Différentes thématiques pourraient, sans exclusive, être dégagées :

Généalogie du texte :

– La réception du texte allemand avant sa traduction intégrale en français (1925-1934)
– Généalogie de la traduction du texte (motivation des éditions Sorlot, lien avec la LICA, équipe de traducteurs)
– La place des anciens combattants dans la production et la réception du texte
– Editions partielles ou idéologiquement motivées (Ex. : Ma Doctrine, Fayard, 1938)

Réception du texte (1925-1945) :

– Réception du livre dans les milieux d’extrême droite français (1925-1940)
– Réception du livre dans les milieux juifs français (1925-1940)
– Réception du livre par les forces de gauche (PCF / SFIO, 1925-1940) ; prise de position de Maurice Thorez
– Trajectoire du texte durant la période de l’occupation (1940-1944)

Trajectoire dans l’après-guerre :

– Stratégie des éditions Sorlot dans l’après-guerre ; procès en 1944
– Mein Kampf dans les politiques alliées de dénazification dans l’Allemagne occupée
– Le débat de 1979 autour de l’avertissement ; la figure de Robert Badinter
– L’utilisation de Mein Kampf dans l’extrême droite
– L’utilisation de Mein Kampf dans l’enceinte scolaire en France

Débats actuels :

– La présence de Mein Kampf dans l’espace digital
– Mein Kampf dans la constellation antisémite contemporaine

Organisateurs

Emmanuel Debono (Ens Lyon) ; David Gallo (CRH/EHESS, CIERA) ; Nicolas Patin (Université Bordeaux Montaigne)

Comité scientifique :

Anne-Sophie Anglaret (Paris 1 Panthéon-Sorbonne) ; Olivier Baisez (Université Paris 8) ; Dorothea Bohnekamp (Université Paris 3 Sorbonne nouvelle) ; Florent Brayard (EHESS/CRH, Paris) ; Christian Ingrao (IHTP/CNRS, Paris) ; Johanna Linsler (EHESS, Paris) ; Stefan Martens (IHA, Paris) ; Marie-Bénédicte Vincent (ENS Ulm, Paris)

Propositions :

Il est demandé d’envoyer une proposition d’une page ainsi qu’un curriculum vitae, avant le 1er mars 2017 à l’adresse suivante : nicolas.patin@u-bordeaux-montaigne.fr. Les langues de travail sont le français et l’anglais.

Édition de référence allemande :

HARTMANN, Christian, VORDERMAYER, Thomas, PLÖCKINGER, Othmar, TÖPPEL, Roman (Hrsg.), Hitler, Mein Kampf. Eine kritische Edition, im Auftrag des Instituts für Zeitgeschichte, München – Berlin, 2016, 1966 p., ISBN 978-3-9814052-3-1.

Éditions de référence française :

– [traduction intégrale] HITLER, Adolf, Mein Kampf. Mon combat, traduction de André Calmettes et Maurice Gaudefroy-Demombynes, Nouvelles éditions latines (Fernand Sorlot), Paris, 1ère édition février 1934. Version facsimilée, accompagnée de l’avertissement de 1979, aux Nouvelles éditions latines, 688 p.

– [traduction non-intégrale] HITLER, Adolf, Ma doctrine, texte traduit et établit par François Dauture et Georges Blond, Librairie Arthème Fayard, « Les grandes études politiques et sociales », Paris, 1938, 348 p.